Anti-erreurisme en plongée: appliquez votre formation sur les facteurs humains à la plongée récréative

- french darryl owen Sep 17, 2020

Anti- erreurisme en plongée: avez vous entendu parler des facteurs humains? Par Darryl Owen, Freestyle Divers. Cet article est paru initialement dans la revue Emirates Diving Association, le 1 Mars 2020.

On accorde de plus en plus d’attention aux facteurs humains et aux compétences non techniques dans le monde de la plongée, une nouvelle tendance en grande partie conduite par Gareth Lock, basé au Royaume Uni, et fondateur du système décrit sur le site www.thehumandiver.com. Son livre ,“Under Pressure” a aidé des milliers de personnes à jeter un regard nouveau sur la plongée. Il se peut que vous vous demandiez ce que sont les facteurs humains et les compétences non techniques, car ce n’est pas quelque chose dont on parle tout les jours.

Afin d’éclaircir ces termes, parlons d’abord de ce qu’ils ne sont pas. Ce ne sont pas des qualifications de plongée - ils ne vont pas vous emmener plus profond ni vous enseigner comment utiliser une nouvelle pièce d’équipement ou de nouvelles techniques (d’où le terme ‘ compétences non techniques’) et ce ne sont définitivement pas ‘juste une nouvelle carte de certif’ à ajouter à votre collection.

Les compétences non techniques visent à améliorer la prise de décision, grâce à une bonne perception situationelle, communication, travail d’équipe et leadership. En d’autres termes, tous les facteurs humains qui nous maintiennent en sécurité pendant les activités à haut risque. L’industrie aéronautique a joué un rôle déterminant dans le développement de plusieurs de ces concepts qui seront familiers à nos copains plongeurs d’Emirates et de Etihad.

Dans le domaine de l’aviation, ces concepts sont connus sous le nom de gestion des ressources de l’équipage (voir CRM en anglais). Il s’agit d’un élément essentiel en sécurité aérienne qui contribue à assurer la sécurité des passagers et des membres d’équipage dans un environnement à haut risque.

En tant que plongeurs, instructeurs ou responsables de centre de plongée, peu d’entre nous travaillent dans l’aviation, alors en quoi cela nous intéresse-t-il?

Probablement, la raison la plus importante est que nous voulons profiter au maximum de ce merveilleux sport, tout en étant sûrs que tout le monde rentrera entier à la maison pour profiter d’une autre plongée. Alors penchons-nous sur les raisons qui font que parfois quelque chose tourne mal.

La plupart des plongeurs ont, à un moment ou à un autre, eu une désagréable expérience sous l’eau. Il peut s’agir d’un masque qui prend l’eau, de se perdre, de manquer d’air, d’un équipement défectueux, ou bien même d’être victime ou témoin d’un accident de plongée. Quoi qu’il en soit, personne ne s’était réveillé ce matin-là et avait prévu d’avoir des problèmes -on se réjouit tous d’une superbe journée de plongée en perspective, c’est ensuite seulement qu’il nous arrive un truc.

Peut-être que c’était parce nous n’avions pas vérifié notre équipement correctement et simplement supposé que tout fonctionnerait (complaisance). Peut-être que nous avions mal compris ou pas écouté attentivement le briefing (communication). Peut-être que nous n’avions pas realisé quel était notre rôle dans le binome (travail d’équipe). Peut-être que nous n’avions pas remarqué ce qui se passait autour et de nous et n’avons pas su quoi faire ensuite (conscience de la situation). Peut-être que nous nous sentions tout simplement fatigués ou distraits, et rien ne semblait se passer correctement (stress et fatigue).

Peut-être que c’était une combinaison de beaucoup de petites choses qui, mises bout à bout, en ont fait une mauvaise journée. Nous en avons tous eu. Mais qu’avons nous fait par la suite pour nous assurer que ça ne se reproduise pas? Très souvent, la réponse à cette question dépendra du résultat (situé quelque part sur une échelle, entre bon et mauvais), et si nous avons ou non réellement pris le temps de débriefer la plongée pour en apprendre davantage. Si un accident a été perçu juste comme une gêne mineure, disons un masque qui fuit, peut-être que nous nous disons que ce n’était pas si grave, jetons le masque dans le sac de plongée et l’oublions jusqu’à la plongée suivante, dans l’espoir que ça ira mieux la prochaine fois. Mais que faire s’il s’agit d’un détendeur ou d’un tuyau qui fuit? Si nous revenons de la plongée en toute sécurité, faisons nous la même chose et le jetons nous dans le sac jusqu’à la prochaine plongée? Après tout, ce n’était que des petites bulles…

Nous savons tous qu’on ne devrait pas plonger avec un équipement défectueux mais étant humains, nous rationalisons souvent une situation en nous appuyant sur sa finalité (partialité basée sur le résultat). “J’ai plongé avec une fuite sur mon premier étage, mais tout s’est très bien passé et nous avons fait un bonne plongée”. Dans cette situation, nous avons juste dépassé la première limite de sécurité, mais nous sommes sain et saufs. Alors nous décidons de replonger avec ce premier étage (pourquoi pas? Il a fonctionné la dernière fois) et survivons de nouveau. Notre cerveau a maintenant déplacé la limite de sécurité de ‘ ne jamais plonger avec un équipement défectueux’ à ‘il est acceptable de plonger avec un équipement légèrement défectueux’. Ça peut continuer ainsi jusqu’à ce que le premier étage lâche sous l’eau et provoque un incident bien plus sérieux. En termes de facteurs humains, cela s’appelle la normalisation de la déviance et nous le faisons tous- un autre exemple, qui suit la même logique: la plupart des conducteurs se retrouvent avec quelques amendes par an pour excès de vitesse.

Beaucoup d’entre nous avons lu sur internet des récits d’accidents ou de décès en plongée, et souvent de nombreux détails manquent dans les rapports. Cela n’empêche pas les gens qui n’étaient pas présents de faire toutes sortes de suppositions pour combler les lacunes, suivies d’une analyse après coup, basée sur les informations disponibles ou supposées.

Une analyse typique impliquerait des commentaires tels que ‘ils auraient dû faire ça! C’était évident que ça se terminerait mal!’ Sauf que pour les victimes, les choix faits avec leur vision des choses à ce moment là, étaient parfaitement logiques- elles ne se sont pas réveillées en pensant: ‘aujourd’hui je vais avoir un accident’. Les gens ont une tendance à regarder les faits rétrospectivement utilisant des phrases telles que:’ ils auraient pu…’, ‘à leur place, j’aurais…’ et ‘ils auraient du…’. c’est une réaction normale. Nous essayons d’apporter de l’ordre là où règne le chaos et cette logique est connue sous le nom de raisonnement contrefactuel. Nous pensons que si les personnes en question avaient agi autrement, alors la situation aurait eu un heureux dénouement. Le problème est que réécrire  l’histoire ne nous aide pas à établir les causes sous-jacentes ( pourquoi l’incident s’est produit) ce qui est essentiel pour éviter des problèmes similaires à l’avenir.

Nous avons examiné plusieurs exemples de la façon dont les facteurs humains affectent la plongée et qui, j’en suis sûr, trouveront un écho parmi les plongeurs, du débutant au professionel. En supposant qu’aucun d’entre nous ne veut passer une mauvaise journée, une partie de la solution est d’introduire un type de formation différent, permettant d’améliorer nos compétences non techniques. Nous sommes tous humains et nous faisons tous des erreurs. La clé d’une vie longue et heureuse en tant que plongeurs est d’apprendre a échouer en toute sécurité.

Le cours “ les Facteurs Humains en plongée” met l’accent sur le “pourquoi”, pour compléter l’entraînement de plongée que vous aurez déjà suivi ( le “comment”). Il a été conçu pour vous aider à comprendre les techniques que vous pouvez utiliser pour rester en sécurité.

D’un point de vue classique, il n’y a pas d’exercices de plongée, on ne se mouille même pas!

Le cours de Facteurs Humains/ compétences non-techniques est un moyen d’examiner les raisons pour lesquelles nous agissons comme nous le faisons en tant qu’individu et en tant que membre d’une équipe, au moyen de la discussion et de la simulation informatique. Nous mettons en pratique différentes compétences non techniques dans le but de recadrer notre compréhension de nous-mêmes et de nous encourager à une plus grande efficacité en tant que communicateurs, membres d’une équipe et aussi, plongeurs.

(Traduction, Diane Talbotier)