Le meilleur est l’ennemi du bien

- french communication jenny lord leadership teamwork Jun 05, 2020

Il y a quelques temps, Gareth m’a demandé d’écrire, en tant qu’instructrice nouvellement certifiée en Facteurs Humains, un blog pour son site internet. Nous avons discuté d’un sujet et tout semblait parfait. Pourtant, malgré tous les efforts possibles, je ne parvenais tout simplement pas à expliquer le sujet aussi éloquemment que je le souhaitais. Nous avons donc eu une autre discussion, et j’ai essayé un sujet différent. Même résultat. Le problème venait du fait que, quoi que j’écrive, j’avais l’impression que ça ne correspondait pas avec ce que Gareth et les autres nouveaux instructeurs avaient écrit. Et c’est à ce moment là que ca a fait tilt- j’étais moi-même en train d’oublier le facteur humain.

J’enseigne une grande variété de sports depuis vingt ans et je me considère comme une instructrice compétente et prudente. J’enseigne la plongée depuis dix ans, donc on pourrait  penser qu’à ce stade je serais plutôt satisfaite de mon niveau de connaissance. Mais c’est justement ça le problème; pratiquement chaque fois que je mets les pieds dans une salle de classe, je m’attends à ce que quelqu’un me mette au défi, réalise qu’en fait je n’ai aucune idée de ce dont je parle, et que mes connaissances sur le sujet sont loin d’être à la hauteur. Depuis que je suis devenue instructrice en Facteurs Humains, c’est un sentiment que je ressens plus particulièrement intensement. Lorsque je l’ai dit à Gareth, il m’a fait remarquer que j’en sais malgré tout beaucoup plus que mes élèves, et que si je me trouvais face à des questions auxquelles je ne connais pas la réponse, j’avais la possibilité de reprendre mon habitude de leur dire que je ne savais pas et que je me renseignerais (ce qui en général fonctionne bien car ça m’oblige à faire des recherches sur le sujet que je ne maîtrise pas). J’étais quand meme encore un peu inquiète. 

En tant qu’élève apprenant les Facteurs Humains, tout m’avait semblé evident, pratiquemment du bon sens. À coup sûr, mes propres élèves penseraient la même chose, non? Et bien c’est justement une partie du problème lorsque l’on explique aux gens pourquoi ils devraient s’intéresser aux Facteurs humains, certains le voient simplement comme du bon sens, alors pourquoi devraient ils apprendre ce sujet?

Et mes efforts mis dans l’écriture de ce blog illustrent parfaitement pourquoi. Aussi evidente que soit la raison, tant qu’on ne vous l’a pas fait remarquer, il est incroyablement difficile de voir que cela s’applique a vous meme. Les personnes qui ont le plus besoin de ce cours sont celles qui diront, lorsque l’on discute d’un incident et de la raison de son occurrence: “et bien, oui, ça c’est ce que la plupart des gens feraient, mais moi je ne ferais jamais ça”.

Il m’a fallut une longue discussion avec un ami intime au sujet de ma frustration engendrée par ma tentative d’écrire cet article, pour comprendre ce que je faisais. Beaucoup ont entendu parler de l’effet Dunning-Kruger. C’est ce qui arrive lorsque quelqu’un avec peu de connaissances sur un sujet, croit qu’il en sait beaucoup plus que ce qu’il sait réellement. Ça a été observé maintes et maintes fois: lorsque les plongeurs commencent un cours, beaucoup pensent que ça sera facile; après tout, tout ce qu’on à faire c’est mettre ce truc pour respirer dans la bouche et nager, pas vrai? Le point intéressant que Dunning et Kruger ont constaté, ç’est que de l’autre coté de la balance, les experts pensent qu’ils ne savent rien. Parce qu’ils comprennent l’étendue du sujet, ils ont appris qu’ils en on a peine effleuré la surface. Après tout, il est impossible, même pour les meilleurs experts au monde de savoir absolument tout ce qu’il y a à savoir sur un sujet.

Alors, voila. Moi, en tant que nouvelle instructrice, je ne sais rien. Ceci étant, j’ai une assez bonne idée de tout ce qu’il reste encore à savoir. Donc, peut être que en fin de compte, si, je sais quelque chose.

Jenny Lord


Jenny enseigne la plongée technique à plein temps. Avant de travailler dans la plongée, elle a été pendant dix ans formatrice pour les activités de plein air, enseignant entre autres l’escalade, le canoë et kayak en eau-vive, la voile, le ski, la speleologie et le cyclisme.

Son intérêt pour le developpement d’équipe a débuté avec l’enseignement des activités de plein air, l’utilisant comme un outil pour aider les gens à se developer dans le domaine de la communication, de la planification et du travail d’équipe.

Depuis 2009, elle vit a Dahab, Egypte, enseignant la plongée sous-marine. Elle est maintenant Instructor Trainer pour TDI, Advanced Trimix Instructor,  plongeuse qualifiée en mélanges CCR et Helitrox CCR Instructor.

Jenny a participé à plusieurs plongées profondes, en tant que membre de l’équipe des plongeurs de support H2O, et travaille comme plongeuse de sécurité pour les cascades cinematographiques.